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Le président de la chambre régionale d’agriculture de Corse squatte les terres du Conservatoire du littoral

25 JANVIER 2020 PAR HÉLÈNE CONSTANTY

Jean-François Sammarcelli, le nouveau président de la chambre régionale d’agriculture de Corse. © Capture d’écran de F3Corse.

Le président de la chambre régionale d’agriculture de Corse Jean-François Sammarcelli occupe sans autorisation 400 hectares dans le massif de l’Agriate, qui lui ont permis de toucher 140 000 euros d’aides européennes. Quatrième épisode de notre série sur les dérives de l’agriculture en Corse.

En Italie, on la nomme la mafia dei pascoli (la mafia des pâturages). Mercredi 15 janvier, quatre-vingt-quatorze personnes ont été arrêtées en Sicile et cent cinquante et une exploitations agricoles mises sous séquestre, lors d’un impressionnant coup de filet dirigé par le parquet de Messine, qui a mobilisé des centaines de carabiniers. Le réseau démantelé, dirigé par deux familles mafieuses des monts Nebrodi, au nord-est de l’île, est soupçonné d’avoir détourné près de dix millions d’euros d’aides de la politique agricole commune (PAC), en prenant frauduleusement possession de terres agricoles destinées à l’élevage.

En Corse, la nouvelle de ces arrestations a résonné comme un coup de semonce. Depuis plusieurs mois, comme Mediapart l’a documenté, la justice française s’intéresse de près à un processus similaire de détournements d’aides européennes, au profit de plusieurs familles d’éleveurs, soupçonnées de déclarer fictivement de vastes surfaces de terres sans les exploiter réellement.

Leurs modes opératoires présentent de nombreuses similitudes avec ceux des Siciliens, comme l’a fort bien montré le réalisateur Jean-Charles Chatard dans son documentaire Prime à fraude, diffusé sur France 3 Corse ViaStella le 29 mars 2019, dans lequel une séquence est consacrée à la mafia des monts Nebrodi.

Mais les opérations conduites en Corse par les gendarmes, sous la responsabilité des parquets d’Ajaccio et de Bastia, sont loin d’avoir la même envergure qu’en Sicile. Seules quelques familles, proches des cercles du pouvoir agricole, ont été ciblées jusqu’à présent. Et surtout, nuance de taille, le mot mafia n’est jamais prononcé. En Corse, il n’existe pas de mafia structurée à la sicilienne, avec un chef, une hiérarchie et des rites d’allégeance.

En revanche, les premières enquêtes judiciaires ont mis au jour un système sophistiqué de détournements de fonds européens, vallée par vallée, massif par massif, par les éleveurs bovins les mieux informés des arcanes du système.

Nouvelle pièce au dossier, Mediapart est en mesure de révéler que Jean-François Sammarcelli, le nouveau président de la Chambre régionale d’agriculture de Corse, déclare plus de 400 hectares de terre caillouteuse dans l’Agriate, un immense massif aride et sauvage du nord-ouest de l’île, déserté depuis les années 1950. Co-actionnaire du GAEC Lama, du nom de son village de Haute-Corse, Jean-François Sammarcelli et son associé ont bénéficié de 111 000 euros d’aides de la PAC en 2016-2017 et 85 000 euros en 2017-2018, selon les données publiquement consultables sur le site Telepac du ministère de l’agriculture. Selon nos informations, en 2019, le GAEC Lama a déclaré au total 823 hectares (dont 290 hectares éligibles aux aides), répartis sur une dizaine d’îlots, pour un troupeau d’une centaine de vaches et 170 brebis.

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Une famille du grand banditisme corse suspectée de fraude aux aides agricoles

17 DÉCEMBRE 2019 PAR HÉLÈNE CONSTANTY

La traque des fraudeurs aux aides agricoles européennes prend de l’ampleur en Corse. Des membres de la famille Costa, réputée dans le grand banditisme, sont visés par une enquête préliminaire pour escroquerie en bande organisée, ouverte par le parquet de Bastia.

Un impressionnant dispositif de contrôle antifraude a été déployé le 6 décembre dans cinq exploitations agricoles de Moltifao et Asco, des villages de montagne du centre de la Corse : plusieurs dizaines de gendarmes, des fonctionnaires de la direction départementale des territoires et de la mer, des contrôleurs de la Mutualité sociale agricole…

Les cinq exploitations ciblées par le Comité départemental antifraude (Codaf) ont bénéficié au total de 850 000 euros d’aides agricoles entre 2015 et 2019. Mais la justice doute de la réalité de leur activité d’élevage bovin. « Nous avons de forts soupçons d’irrégularité concernant ces exploitants, dont deux ont refusé le contrôle », précise Caroline Tharot, la procureure de la République de Bastia.

Le principal personnage visé par cette enquête est Patrick Costa, 47 ans.

Il appartient à une famille « historique » de la Brise de mer, un clan mafieux qui a dominé le grand banditisme en Haute-Corse pendant plusieurs décennies, jusqu’à la mort violente de plusieurs de ses chefs, notamment celle de Maurice Costa, oncle de Patrick Costa, assassiné le 7 août 2012 dans une boucherie de Ponte-Leccia.

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Les pressions mafieuses s’intensifient à Ajaccio

21 SEPTEMBRE 2019 PAR HÉLÈNE CONSTANTY

Manifestation de soutien à Jean-André Miniconi le 30 juillet. Léo Battesti au micro et Jean-André Miniconi en chemise bleue à sa droite.
Manifestation de soutien à Jean-André Miniconi le 30 juillet. Léo Battesti au micro et Jean-André Miniconi en chemise bleue à sa droite.

Deux incendies criminels visant l’ancien président de la Chambre de commerce ont provoqué une mobilisation citoyenne. Ils pourraient être liés aux exactions d’un groupe mafieux qui accroît son emprise sur l’économie locale.

La campagne électorale en vue de l’élection municipale de mars 2020 a démarré sous un ciel plombé à Ajaccio.

Dans la nuit du 27 au 28 août, une concession automobile Mercedes a été la cible d’une tentative de mise à feu criminelle. En arrivant le matin, les employés ont senti une forte odeur et constaté que plusieurs véhicules avaient été aspergés d’essence. Le propriétaire de l’établissement, Jean-André Miniconi, un chef d’entreprise influent, ancien président de la Chambre de commerce et d’industrie d’Ajaccio et de la Corse-du-Sud (CCI2A) et président régional de la Confédération des petites et moyennes entreprises, venait d’annoncer son souhait de se porter candidat à l’élection municipale, avec le soutien de l’autonomiste Gilles Simeoni, président de l’exécutif de la Collectivité territoriale.

Un mois plus tôt, dans la nuit du 27 au 28 juillet, un autre établissement du groupe Miniconi, une concession moto qui venait d’ouvrir, avait déjà été endommagé par un incendie criminel : le feu, parti d’une aile du bâtiment, s’était propagé à l’intérieur de l’atelier de réparation, avant que les pompiers ne parviennent à l’éteindre.

L’hypothèse d’une rivalité commerciale, un temps envisagée après le premier incendie, semble peu vraisemblable après le second. S’agit-il d’un avertissement visant à dissuader Jean-André Miniconi de se présenter à la mairie d’Ajaccio ? Ou d’un épisode de plus dans la guerre des clans criminels qui ensanglante Ajaccio depuis des décennies ?

Sans attendre les conclusions des deux enquêtes judiciaires ouvertes par le parquet d’Ajaccio, les Ajacciens ont manifesté publiquement leur colère et leur ras-le-bol face à ce qu’ils interprètent comme une intensification de la pression mafieuse sur les entreprises locales.

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Cannabis : la grande lessiveuse

Au sommaire de La Revue dessinée numéro 23, en librairie le 6 mars, mon sujet sur le blanchiment de l’argent du trafic de cannabis, dessiné par le talentueux Pierre-Henry Gomont.

Plus d’un milliard d’euros, c’est la somme que brassent chaque année les trafiquants de cannabis en France. Alchimistes du marché de la drogue, ils sont passés maîtres dans l’art de changer l’herbe et la résine en or. Mais une fois la marchandise écoulée, comment rendre l’argent sale plus blanc que blanc ? En s’appuyant sur un réseau d’intermédiaires déployés sur trois continents. De l’Inde au Maroc, des petites mains de Seine-Saint-Denis aux évadés fiscaux des beaux quartiers parisiens, le circuit du blanchiment traverse des mondes que tout oppose. Impunément ? En 2012, la police judiciaire a décidé de frapper les trafiquants au portefeuille…